L’IPEN (le Réseau international pour l’élimination des polluants), Arnika (ONG tchèque) et 16 ONGs européennes, dont le Réseau Environnement Santé (RES), exhortent, dans une lettre ouverte aux membres du Parlement européen et aux États Membres, de soutenir des valeurs limites plus strictes pour les polluants organiques persistants (POP) qui entrent dans le recyclage et les exportations de déchets.
Les limites actuellement proposées par la Commission Européenne sont incompatibles avec le Green Deal européen, portent atteinte à la Convention de Stockholm, et conduiront à une perte de crédibilité de la capacité de l’UE à garantir des produits recyclés non toxiques. Plus grave encore, la confiance des citoyens dans l’économie circulaire sera mise en péril si des normes plus strictes ne sont pas adoptées.
La Commission européenne propose d’adopter de nouvelles valeurs limites pour les polluants organiques persistants (POP) dans les déchets. La proposition de la Commission vise à modifier les annexes IV et V du règlement (UE) 2019/1021 et sera discutée au Parlement européen au cours des premiers mois de 2022.
Les POP sont des produits chimiques toxiques et persistants comprenant les dioxines, les PCB, certains perfluorés (PFAS) et les retardateurs de flamme bromés (PBDE). La Convention de Stockholm exige la destruction des déchets qui dépassent les valeurs limites des POP (connues sous le nom de niveaux de faible teneur en POP fixés par la Convention de Bâle) et interdit le recyclage des déchets contaminés par des POP afin de maintenir des cycles de matériaux non toxiques. Cependant, la Commission propose des limites laxistes de POP, ce qui permettra aux plastiques et autres déchets contaminés par des POP d’être, en pratique, recyclés par l’industrie dans l’UE. La transition vers des cycles de matériaux de haute qualité et exempts de substances toxiques ne peut être réalisée tout en autorisant le recyclage des POP dans les matériaux.
Le recyclage des POP dans les déchets entraînerait la contamination des nouveaux produits, y compris les jouets, fabriqués à partir du recyclage. Cela perturberait l’économie circulaire en permettant aux matériaux riches en POP de circuler dans nos produits et nos déchets, et augmenterait l’exposition humaine des populations vulnérables.
Plusieurs secteurs industriels (principalement le plastique, le recyclage et l’incinération des déchets) font pression sur les régulateurs de l’UE pour qu’ils fixent des limites laxistes qui leur permettraient d’avoir accès à davantage de matériaux à recycler, même s’ils sont fortement contaminés par des POP. Si de tels POP sont recyclés dans de nouveaux produits, la crédibilité du recyclage et de l’économie circulaire dans son ensemble sera mise en péril.
L’UE peut fixer des normes relatives aux POP qui soient cohérentes avec les ambitions du Green Deal européen, mais cela ne peut se faire qu’en proposant des valeurs limites fortes pour les POP dans les déchets. L’établissement de cycles de matériaux exempts de substances toxiques, la protection de la santé publique et l’instauration de la confiance dans les produits recyclés ne seront possibles que si les institutions européennes garantissent la valorisation des flux de déchets propres en produits recyclés.
Malheureusement, l’approche « recycler à tout prix » de la Commission Européenne néglige les graves dommages pour la santé humaine et les coûts socio-économiques connexes qui peuvent résulter du recyclage des déchets contenant des POP – ce qui se traduit par la suggestion actuelle de valeurs limites intermédiaires. Il est également important de mentionner qu’avec l’adoption de telles valeurs, les industries utilisatrices en aval souffriront de l’obtention de matériaux recyclés contenant des niveaux élevés de produits chimiques hérités, ce qui les empêchera d’accroître l’utilisation de matériaux recyclés et leur réintégration dans l’économie.
D’autres facteurs tels que la capacité technique de mesurer de faibles concentrations de POP et leurs niveaux de fond dans l’environnement sont également pris en compte dans la méthodologie. La Commission propose des niveaux se situant au milieu de cette fourchette, accordant à l’industrie des concessions majeures pour permettre le recyclage des plastiques riches en POP et des cendres riches en dioxines, tout en abandonnant le principe de précaution et les limites de POP protectrices de la santé.
Il est également important de mentionner qu’avec l’adoption de telles valeurs, les industries utilisatrices en aval souffriront de l’obtention de matériaux recyclés contenant des niveaux élevés de produits chimiques hérités, ce qui les empêchera d’augmenter l’utilisation de matériaux recyclés et leur réintégration dans l’économie.
L’IPEN, Arnika et d’autres organisations européennes de la société civile proposent un niveau pour les PBDE de 50 mg/kg qui peut être mis en œuvre avec la technologie actuelle.
La transition vers des cycles de matériaux de haute qualité et exempts de substances toxiques ne peut coexister avec une approche qui autorise le recyclage de déchets contenant des POP sur la base de valeurs limites laxistes pour les POP.
En fixant des valeurs limites exigeantes pour les POP dans les déchets, l’UE peut faire preuve d’un leadership mondial, accroître la protection de la santé humaine et promouvoir le développement de l’économie circulaire sans contamination.
Au contraire, l’adoption de valeurs limites laxistes fera plus de mal que de bien et réduira la crédibilité à long terme du recyclage. L’établissement de valeurs limites exigeantes pour les POP dans les déchets aujourd’hui favorisera considérablement l’avenir d’une économie circulaire exempte de toxiques, car il encouragera l’innovation dans le recyclage, augmentera la pression sur les concepteurs industriels pour qu’ils retirent les POP des produits, et garantira que l’économie circulaire ne soit pas empoisonnée à ses débuts.
Par conséquent, nous appelons le Parlement européen et les États membres à soutenir des valeurs limites plus ambitieuses pour les POP dans les déchets que celles proposées par la Commission européenne,