En 2009, le Réseau Environnement Santé (RES) demandait à l’AFSSA (devenue ANSES) de réexaminer ses avis sur le PFOA et de prendre en compte une étude montrant que l’exposition à ce dangereux composé perfluoré (PFC) était responsable d’une diminution importante de la qualité du sperme chez l’humain.
Aujourd’hui le RES soutient la « Déclaration de Madrid » [1], rédigée par 14 chercheurs et signée par 208 scientifiques, qui dénonce la propagation et l’accumulation croissante de substances alkylées poly- et Perfluorées (PFAS) dans l’environnement, au point que la population mondiale et les écosystèmes en sont aujourd’hui imprégnés.
Les auteurs demandent la coopération de la communauté internationale (scientifiques, gouvernements, fabricants, consommateurs etc.) pour que des mesures radicales soient prises afin de limiter la production et l’utilisation des PFAS et développer des solutions alternatives non fluorées plus sûres.
Où trouve-t-on les PFAS ?
Les PFAS appartiennent à la vaste famille des PFC, des substances chimiques anthropiques utilisées dans de nombreuses applications industrielles pour imperméabiliser certains produits ou les rendre antiadhésifs et résistants aux tâches. On les retrouve notamment dans les textiles (vêtements, chaussures, tissus, tapis, moquettes), les emballages en papier et carton pour le contact alimentaire et les ustensiles de cuisine. Ils entrent également dans la composition de certaines applications médicales, des mousses anti-incendie, des isolants de fils électriques, des cires à parquet, des vernis et peintures, des produits nettoyants et de certains pesticides.
Les PFC peuvent se répandre dans l’environnement lors de leur production ou de leur utilisation. Ils migrent alors à partir les produits de consommation dans l’air, la poussière domestique, l’alimentation, les sols, les eaux souterraines et de surface jusque dans l’eau potable.
Dangers liés à l’exposition aux PFAS
La dangerosité des PFAS à chaîne longue repose sur leurs propriétés très persistantes (ils ne se dégradent quasiment pas dans l’environnement), bioaccumulables et toxiques.
Des études montrent que l’exposition aux PFAS peut provoquer des effets graves tels que certains cancers, des dysfonctionnements du foie, des troubles thyroïdiens et neurocomportementaux, une élévation du taux de cholestérol, un faible poids de naissance, l’obésité, une atteinte du système immunitaire et une perturbation du système hormonal.
Les alternatives
En 2009, un accord a été conclu entre les gouvernements pour restreindre l’utilisation de certains PFAS spécifiques dans le cadre de la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants (POP). Mais leur remplacement progressif a été initié avec des alternatives fluorées à chaîne plus courte, dont la structure est similaire. L’innocuité de ces substituts est également remise en cause car leurs produits de dégradation perfluorés sont tout aussi persistants dans l’environnement.
Les mesures phares
La Déclaration de Madrid demande la mise en place de mesures radicales pour stopper la propagation de cette pollution, à savoir :
• l’adoption d’une loi pour exiger que les PFAS ne soient utilisés que lorsqu’ils sont indispensables,
• l’étiquetage obligatoire des produits contenant des PFAS,
• la mise en place d’un registre public de tous les produits contenant des PFAS,
• l’identification et la surveillance de tous les PFAS présents dans l’environnement, y compris leurs précurseurs et produits de dégradation,
• la responsabilisation des fabricants et la collaboration avec les gouvernements pour éliminer de manière sécuritaire les produits contenant des PFAS,
• la transparence de la part des fabricants sur leurs produits,
• le développement d’alternatives non fluorées.
Après que des chercheurs européens et américains ont évalué le coût des maladies et troubles chroniques liés à l’exposition aux perturbateurs endocriniens (PE) à 157 milliards d’euros pour l’Europe, soit 1,23 % du PIB de l’Union européenne, il est grand temps que les gouvernements et les décideurs européens mesurent l’étendue de la pollution environnementale et agissent en conséquence.
La politique de gestion des risques en vigueur qui consiste à évaluer une petite poignée de substances chimiques par an, comme c’est le cas en France, est manifestement inadaptée. Ce sont au contraire des centaines de composés toxiques, pourtant autorisés, qui nécessitent d’urgence une restriction d’utilisation, voire une interdiction.
[1] – Voir la traduction de la Déclaration de Madrid
Voir la Déclaration originale en anglais