Le 17 novembre dernier, à l’occasion de la Journée Mondiale de la Prématurité au Palais du Luxembourg, le RES a organisé en partenariat avec les sociétés médicales de pédiatres (AFPA et AFPEL), d’endocrinologues (SFE) et de néonatologues (SFN) et ESPT, le colloque: «De la Prématurité aux Maladies Infantiles : l’enjeu des Perturbateurs Endocriniens».
L’objectif de ce colloque était de réunir à la fois des sociétés médicales les plus directement concernées par cette thématique, Association Française de Pédiatrie Ambulatoire (AFPA) et Association Française des Pédiatres Endocrinologues Libéraux (AFPEL), Société Française d’Endocrinologie (SFE) et Société Française de Néonatologie (SFN) mais aussi les collectivités locales qui se sont particulièrement investies sur le sujet (Nice, Strasbourg, région Île-de-France, Blanc-Mesnil), ainsi que les CPAM de l’Indre et de l’Aisne qui ont porté les opérations Zéro phtalates via les éco-ambassadeurs. Ces fructueux échanges ont permis d’ancrer la campagne VTSPE au regard des indicateurs majeurs de santé que sont la prématurité, la mortalité infantile et les maladies infantiles. La présence en conclusion de la Fédération Nationale des CPTS ouvre la voie à la mobilisation de l’ensemble des professionnels de santé.
Ce colloque a permis d’illustrer l’importance d’avoir une approche de santé globale pour répondre à l’enjeu que représente l’importance de la prématurité, de la mortalité infantile et des maladies infantiles en prenant en compte à la fois les conditions d’exercice des professionnels de santé et l’action sur les causes environnementales.
Dans le monde, un enfant sur dix naît prématurément ce qui correspond à la naissance d’un enfant prématuré toutes les deux secondes. Aujourd’hui, la prématurité constitue la principale cause de mortalité infanto-juvénile et représente près d’un décès sur cinq chez les enfants de moins de 5 ans.
Au niveau européen, la situation Française ne cesse de se dégrader depuis plus de 10 ans. La France est passée de la 3ème place en 1995 à la 21ème sur 27 en 2021. En 2022, l’INSERM avait alerté sur les conséquences de cette situation : « 1200 décès d’enfant par an auraient pu être évités aujourd’hui si la France avait continué à évoluer de la même façon que des pays comme la Suède ou la Finlande » et concluait : « La récente augmentation historique du taux de mortalité infantile depuis 2012 en France devrait donner lieu à une enquête approfondie urgente pour en comprendre les causes et préparer des actions correctives ».
Deux études récentes ont montré l’incidence de l’exposition aux phtalates sur le risque de prématurité (JAMA, Septembre 2022) ainsi que leurs effets délétères sur le placenta et ses fonctions, altérés également par de nombreux autres perturbateurs endocriniens environnementaux. Il existe des périodes de vulnérabilité en particulier pendant la grossesse, l’enfance et la puberté où les PE peuvent modifier le fonctionnement et la mise en place de grandes fonctions comme le développement cérébral, les différents systèmes endocriniens et bien d’autres.
Les effets des phtalates et autres perturbateurs endocriniens sur la survenue de maladies infantiles sont nombreux: troubles de la croissance et du développement (TDAH, troubles cognitifs, autisme…), des anomalies de la puberté, des pathologies thyroïdiennes, des troubles de la reproduction, asthme, des maladies métaboliques comme l’obésité et diabète et certains cancers…
Ces maladies environnementales sont en augmentation de façon globale et les sources de contaminations sont multiples: air intérieur et extérieur, alimentation, cosmétiques, eau de boisson et d’irrigation. Le concept d’exposome expliquant ce phénomène, proposé par le directeur du Centre International de Recherche sur le cancer (CIRC) en 2005, Christopher Wild, désigne la totalité des expositions à des facteurs environnementaux subis par un organisme humain de sa conception à sa mort.
C’est sur la base de ces constats qu’en 2021 les CPAM de l’Indre et de l’Aisne ont développé une offre de service en santé environnementale notamment par la mise en place d’opérations zéro phtalates. Aujourd’hui, plusieurs autres CPAM s’engagent dans la prévention en santé environnementale suite à la mise en place d’un comité de pilotage initiée par les CPAM de l’Indre et de l’Aisne.
Plusieurs collectivités signataires de la charte VTSPE ont initié au sein de leurs territoires des politiques de santé environnementale afin de réduire l’exposition de leurs populations et protéger leur santé.
Parmi elles, la Ville de Nice qui, suite à sa signature de la charte VTSPE en 2021, a décidé de s’engager dans un « Plan de Prévention Phtalates Prématurité et Maladies infantiles ». Ce plan, mené avec un ensemble de partenaires du territoire, est décliné sur plusieurs axes d’actions : sensibilisation du grand public, formation des professionnels et mise en place d’études d’exposition. En parallèle à cela, la Ville de Nice a observé une baisse notable des chiffres de la mortalité infantile entre 2016 et 2021 dans les Alpes-Maritimes, passant de 4,4 à 2,7 pour 1.000 : baisse de près de 40%. Outre l’amélioration des conditions de prise en charge globale des femmes enceintes, ces chiffres permettent de s’interroger sur les bénéfices sanitaires des actions de Santé Environnementale mises en place par la Ville avec un focus particulier sur les PE.
La Ville du Blanc-Mesnil qui enregistre le taux de prématurité -le plus élevé de sa région s’est saisit de l’approche « une seule santé » dans le cadre de son nouveau contrat local de santé (CLS) 2023 – 2028. La Ville favorise la transprofessionnalité afin d’intensifier son action en faveur de la capacité d’agir de sa population, de l’offre de santé ainsi que de la santé environnementale. Parmi les 10 fiches actions du CLS, celle reconnue comme prioritaire par les signataires concerne les perturbateurs endocriniens (PE). L’objectif stratégique est de protéger la population et les écosystèmes de l’exposition aux perturbateurs endocriniens.
La ville de Strasbourg, qui a signé la charte VTSPE en 2018, s’est engagée dans une politique publique en faveur de la réduction des expositions aux perturbateurs endocriniens à travers différents projets d’information et de sensibilisation. Parmi eux, «l’Ordonnance Verte» a permis de sensibiliser des femmes enceintes aux perturbateurs endocriniens et leur permettre l’accès a des paniers de fruits et légumes biologiques.
Forte de son succès, cette expérimentation a atteint son objectif de 800 bénéficiaires au mois de septembre 2023. À cet effet, la collectivité a souhaité pérenniser ce dispositif à partir de janvier 2024, pour 1500 femmes enceintes ou en parcours de PMA, pour une durée de 3 ans et sur le principe d’une durée solidaire pour la distribution des paniers de légumes.
Première Région à signer la Charte Villes et Territoires sans Perturbateurs Endocriniens en 2018, la Région Île-de-France s’est engagée avec le Réseau Environnement Santé à réduire l’exposition des Franciliens à ces substances dangereuses en déployant des actions de sensibilisation en direction des jeunes. Le projet PELIF 1 et 2 de 2020 à 2023 a permis de sensibiliser les lycéens à la question des perturbateurs endocriniens, en particulier au moyen d’une brochure diffusée à 13 000 exemplaires, mais aussi de les faire participer. Pour cela, 489 lycéens de 30 lycées des 8 départements franciliens ont porté un bracelet en silicone pendant 7 jours afin d’évaluer leur exposition à 9 phtalates.
Enfin, les CPTS regroupent les professionnels de soins primaires, de 1er ou 2nd recours avec des acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux, sur un territoire qu’ils déterminent. Les CPTS permettent une meilleure coordination entre ces différents acteurs, pour concourir à la structuration des parcours de santé à la réalisation des objectifs de santé publique définis dans chaque région. Elles constituent ainsi un lieu idéal de réflexion et de mise en place d’action de prévention pour s’emparer collectivement des problématiques de santé environnementale.
Photo : Débat entre le Professeur Jean-Christophe ROZE, Président de la Société Française de Néonatologie et André Cicolella, Président du RES
Crédit Photos : Réseau Environnement Santé
Une série d’évenements en 3 temps avec le soutien financier du Contrat triennal l’Agora Strasbourg Capitale européenne :
Un 1er colloque « Prévention et protection contre les produits chimiques perturbateurs endocriniens : quels rôles pour les villes et les collectivités locales en Europe ? » organisé le 20 avril 2023 au Parlement européen à Strasbourg, par le Réseau Environnement Santé (RES), en partenariat avec la coalition EDC-Free Europe, le Baltic Environmental Forum Allemagne (BEF DE) et le projet Interreg NonHazCity3, s’est avéré être une plateforme précieuse pour partager l’expertise et les meilleures pratiques sur la manière dont les autorités locales font face à la menace croissante des perturbateurs endocriniens tout en exhortant que des mesures européennes et nationales comblent les lacunes réglementaires actuelles. L’objectif était de répondre aux 2 résolutions du Comité européen des Régions et du Parlement européen demandant à la Commission européenne de soutenir la création d’un réseau européen de collectivités mobilisées dans la lutte contre les perturbateurs endocriniens, en s’appuyant sur les expériences existantes en France et dans les pays de la Baltique. Après un discours d’ouverture prononcé par la Ministre Agnès Firmin Le Bodo (en vidéo), puis par Jeanne Barsaghian, Maire de Strasbourg, les échanges entre des représentants du réseau NonHazCity regroupant des villes de la Baltique (Stockholm, Helsinki, Hambourg, Riga, Gdansk) et du Baltic Environmental Forum et des collectivités locales parmi les plus engagées en France (Strasbourg, Nice, Limoges, Régions Île-de-France, Centre-Val-de-Loire), de parlementaires européens et des représentants de la commission ont posé la première pierre de ce réseau européen, en mettant en évidence la richesse des expériences.
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Un second colloque le 22 novembre 2023 « Réduire l’exposition aux perturbateurs endocriniens : Quels enjeux sanitaires ? Quels leviers pour les collectivités locales en France ? », co-organisé par le Réseau Environnement Santé (RES), la Ville/Eurométropole de Strasbourg, et le Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT), en partenariat avec le Réseau français Villes-Santé (RfVS), Elus Santé Publique et Territoire (ESPT), EDC-Free Europe, et la Société Française d’Endocrinologie (SFE). Cet événement, qui a réuni plus de 200 participants en distanciel, en majorité des agents et des élus des collectivités locales, a été marqué par des tables rondes politiques et scientifiques, ainsi que par des séquences techniques sous forme d’ateliers, organisées dans le sillage particulier du 17 novembre, journée mondiale de la prématurité. En s’engageant dans la réduction des perturbateurs endocriniens sur leur territoire, les collectivités locales, acteurs majeurs en santé environnementale, contribuent à diminuer les inégalités sociales de santé via la prévention de nombreuses pathologies, à commencer par la prématurité, la mortalité infantile et les maladies infantiles. Les collectivités peuvent tout d’abord agir dans les bâtiments dont elles sont gestionnaires, en priorité ceux accueillant des populations vulnérables comme les jeunes enfants. Elles ont également la capacité d’informer et de mobiliser de nombreux publics et parties prenantes, les incitant ainsi à agir à leur tour pour réduire les expositions.
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Une manifestation préparatoire « De la Prématurité aux Maladies Infantiles : l’enjeu des Perturbateurs Endocriniens » avait eu lieu le 17 novembre 2023 au Sénat à l’occasion de la journée mondiale de la prématurité, organisée par le le Réseau Environnement Santé (RES) en partenariat avec les sociétés médicales de pédiatres (AFPA et AFPEL), d’endocrinologues (SFE) et de néonatologues (SFN) et Elus Santé Publique et Territoire (ESPT). Cette matinée a permis de fructueux échanges permettant d’ancrer la campagne VTSPE en regard des indicateurs majeurs de santé que sont la prématurité, la mortalité infantile et les maladies infantiles. L’objectif de ce colloque était de réunir à la fois des sociétés médicales les plus directement concernées par cette thématique (AFPA et AFPEL, SFE et SFN) mais aussi les collectivités locales qui se sont particulièrement investies sur le sujet (Nice, Strasbourg, région Île-de-France, Blanc-Mesnil), ainsi que les CPAM de l’Indre et de l’Aisne qui ont porté les opérations Zéro phtalates via les éco-ambassadeurs. La dimension mondiale était donnée par la présence de Anna Gruending, co-rédactrice du rapport « Born too soon » du colloque OMS, UNICEF et PMNCH tenu à Johannesburg sur la « Prématurité, 1ère cause mondiale de mortalité infantile ». La présence en conclusion de la Fédération Nationale des CPTS ouvre la voie à la mobilisation de l’ensemble des professionnels de santé.
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