L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) vient de publier ce mercredi 22 septembre ses nouvelles lignes directrices en matière de qualité de l’air. Celles-ci mettent à jour les normes fixées en 2005 sur la base d’une synthèse des meilleures études scientifiques disponibles [1].
Le plus marquant est la diminution par deux de la norme pour les particules fines (PM 2,5) qui passe de 10 à 5 µg/m3 et par 4 de la norme pour le dioxyde d’azote (NO2) qui passe de 40 à 10 µg/m3. Voir annexe I.
Les effets sanitaires sont de plus en plus clairement identifiés (Cancer du poumon, accident vasculaire cérébral (AVC), infarctus, BPCO (Broncho-Pneumopathie Chronique Obstructive), asthme, diabète… Avec, selon l’OMS, 7 millions de décès prématurés dans le monde dont au moins 40 000 en France et 400 000 en Europe, la pollution de l’air constitue un risque pour la santé à la hauteur du tabagisme et de la mauvaise alimentation.
Des politiques publiques de réduction et de prévention de ce risque doivent urgemment être financées car le coût de l’inaction est exorbitant. Dans l’Union européenne, ce sont chaque année 940 milliards d’euros qui sont dépensés dans le soin de ces maladies que nous avons nous-même créées. En France, nous nous appauvrissons chacune et chacun d’environ 1 600 € par an pour entretenir cette spirale toxique [2].
Le RES souligne qu’en matière de qualité de l’air, la santé de l’enfant est un enjeu particulièrement négligé. Non seulement leur santé peut être affectée avant même la naissance, avec des conséquences à vie, mais les enfants sont largement vulnérables à l’air pollué, leurs poumons, leur cœur, leur cerveau, leurs systèmes respiratoire, immunitaire et nerveux étant encore en développement.
Pour inciter les décideurs européens à passer à l’action, HEAL, alliance européenne rassemblant plus de 90 organisations engagées en santé environnementale et dont le RES est un membre actif, précise notamment dans un document de position les étapes clés à mettre en œuvre au niveau européen [[3]]. Voir annexe II.
Au cours des dernières années, ce sont principalement les gouvernements nationaux qui ont freiné l’action en matière de qualité de l’air. Plusieurs États, dont la France, font l’objet de condamnations devant la Cour de justice de l’UE pour non-respect des actuels standards européens alors même que ces normes n’avaient pas encore été revues à la baisse au niveau recommandé par l’OMS aujourd’hui.
La responsabilité des États est accablante puisque l’OMS a estimé que près de 80 % des décès liés aux PM 2,5 pourraient être évités si les niveaux de pollution actuels étaient ramenés à ceux recommandés dans les nouvelles lignes directrices.
L’OMS rappelle d’ailleurs clairement que s’efforcer d’atteindre les seuils recommandés est bénéfique pour la santé humaine mais aussi pour le climat car les principales sources de pollution de l’air sont celles qui émettent le plus de gaz à effet de serre. Ces liens climat-santé viennent d’être précisés en détail dans la première publication du « Lancet Countdown in Europe » ce 23 septembre dans le Lancet Public Health [4].
Mettre la santé environnementale au cœur de notre politique de santé publique, c’est aussi un axe fort des premiers États Généraux de la Santé Respiratoire (EGSR) lancés le 6 septembre dernier par La Société de Pneumologie de Langue Française avec un collectif de 17 associations de patients et d’usagers et des organisations représentatives des professionnels de santé, dont le RES [5]. Cette démarche inédite propose partout sur le territoire, à tous les citoyens (patients, parents, aidants et usagers) et aux acteurs de terrain (professionnels de santé) de construire ensemble des propositions concrètes pour améliorer la santé respiratoire en France, dans le cadre de 10 thématiques retenues dont une porte sur « Environnement et Santé respiratoire ». Ces propositions seront remises aux candidats à la présidentielle, le 8 décembre prochain à Paris, à l’occasion d’une conférence en ligne de restitution ouverte au grand public. Voir annexe III.
Pour le RES, ces EGSR sont une occasion précieuse de rappeler que la pollution atmosphérique n’est pas la seule pollution qui agit sur la santé respiratoire. Les données scientifiques concernant l’impact de substances chimiques comme les phtalates sont en effet particulièrement solides pour l’asthme, mais elles sont encore trop peu connues du grand public, et même des professionnels de santé. Ces substances toxiques « extrêmement préoccupantes » sont présentes dans l’air intérieur mais aussi dans l’alimentation ou dans les cosmétiques, ce qui conduit aujourd’hui à une contamination totale de la population.
Que ce soit en matière de pollution de l’air, de pollution chimique ou bien encore de pollution électromagnétique, l’ambition « zéro pollution » inscrite dans les textes européens nécessite de changer de nombreux référentiels obsolètes et surtout de faire évoluer notre système de soin en un véritable système de santé. Ce dernier doit faire une large place à la prévention mais surtout à une réglementation qui s’appuie sur une actualisation régulière des connaissances scientifiques. Il n’est plus acceptable d’attendre 15 ans pour la mise à jour d’une norme sanitaire ou environnementale et 15 ans supplémentaires pour sa mise en œuvre, souvent partielle.
Dans le cadre des prochaines élections, le RES appelle donc l’ensemble des forces politiques à prendre des engagements forts et immédiats pour « Faire de la Santé environnementale un pilier du système de santé ».
L’un de ces engagements devra être l’organisation, dans les 100 premiers jours de mandat, d’une Conférence Nationale de Santé Environnementale débouchant sur une loi-cadre pour une réforme majeure du système de santé, un « big bang » des institutions sanitaires.
[1] https://www.who.int/fr/news/item/22-09-2021-new-who-global-air-quality-guidelines-aim-to-save-millions-of-lives-from-air-pollution [2] https://cleanair4health.eu/ [3] https://www.env-health.org/health-groups-call-for-eu-air-quality-standards-to-be-fully-aligned-with-new-who-recommendations/ [4] https://doi.org/10.1016/S2468-2667(21)00207-3 [5] https://www.masanterespiratoire2022.fr/