COMMUNIQUE DE PRESSE
Posté le 16/03/2018,
Le cadmium, ce tueur silencieux, caché dans les engrais phosphatés
Le gouvernement français doit soutenir le projet de réduction des taux de cadmium dans les engrais phosphatés proposé par l’Union européenne
La France n’a toujours pas pris publiquement position sur le projet de la Commission européenne d’abaisser la limite pour la teneur en cadmium des engrais phosphatés. Le cadmium est un métal lourd cancérogène pour l’homme et suspecté d’être un perturbateur endocrinien. De nombreuses études ont montré que les reins et les os sont les principales cibles après une exposition chronique au cadmium.
Le projet de la Commission européenne vise à fixer une limite à 60 mg de cadmium (Cd) / kg de P2O5 dès la date de publication du règlement qui sera abaissée à 40 mg de Cd / kg de P2O5 après 3 ans, puis à 20 mg de Cd / kg de P2O5 après 12 ans. En outre, le Parlement européen a adopté un amendement visant à la création d’un label vert pour les engrais qui contiennent moins de 5 ppm de cadmium, d’arsenic, de plomb, de chrome hexavalent et de mercure, totalement en phase avec le concept d’agriculture durable. A partir du 20 mars, ce texte fera l’objet de négociation entre le Conseil de l’Union européenne, le Parlement européen et la Commission européenne pour aboutir à un texte commun. A ce stade, la position de négociation du Conseil de l’Union européenne est de défendre une limite unique de 60 mg de Cd / kg de P2O5 dans 8 ans. Nous sommes bien loin de l’objectif de la Commission européenne ! Il semble que cette position du Conseil résulte d’un lobby actif de la Pologne, de l’Espagne et de la Grande Bretagne et d’une attitude relativement complaisante de l’Italie et de la France !
L’utilisation des engrais phosphatés inorganiques où les teneurs en cadmium peuvent être supérieures à 60 mg de Cd / kg de P2O5 est la principale cause de la contamination des sols au cadmium. Par conséquent, il pénètre facilement dans les végétaux entrant dans la chaîne alimentaire. On le retrouve en particulier dans les légumes, les céréales et certains aliments d’origine animale (abats, coquillages, crustacés et poissons). L’alimentation représente ainsi 90% de l’exposition au cadmium pour les non fumeurs. Depuis 2009, les autorités sanitaires alimentaires européennes et françaises ont tiré la sonnette d’alarme et recommandent de réduire notre exposition au cadmium par la diminution des contaminations des principaux aliments (légumes, pommes de terre). Alors que notre réglementation nationale autorise des engrais phosphatés à forte teneur en cadmium, 14 Etats membres ont déjà instauré une limite inférieure ou égale à 60 mg de Cd / kg de P2O5. La Finlande, la Hongrie et la Slovaquie ont eux limité la teneur en cadmium à 20 mg de Cd / kg de P2O5. Ces différents exemples nous montrent qu’une législation européenne ambitieuse pour réduire notre exposition au cadmium est plus qu’à portée de main.
Si d’autres pays de l’Union européenne se sont déjà mobilisés pour réduire les teneurs en cadmium dans les engrais phosphatés, comment se fait il que nous n’entendions pas la voix de la France ? Pourtant, le cadmium étant reconnu comme perturbateur endocrinien, ce projet s’inscrit dans la ligne droite de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens adoptée en 2014 dont l’objectif est la réduction de l’exposition de la population et dont le bilan vient de faire l’objet d’une appréciation très positive des Inspections générales. Les perturbateurs endocriniens sont impliqués dans les grandes atteintes de la santé comme les cancers du sein et de la prostate, les troubles de la reproduction, l’obésité le diabète ou encore l’autisme. Comme le rappelle André Cicolella, Président du Réseau Environnement Santé, «les perturbateurs endocriniens ne sont pas des substances comme les autres, il faut les éliminer à la source car on ne peut pas gérer par la dose » et le meilleur moyen de s’en protéger est de « diminuer au maximum les sources de contamination ». Dans cette perspective, le projet de la Commission européenne, s’inscrit dans la bonne démarche.
Le projet de la Commission européenne constitue une opportunité pour réduire l’exposition au cadmium de la population et Réseau Environnement Santé a décidé d’interpeller les ministres de la Santé, de l’Agriculture et de la Transition écologique et solidaire pour obtenir l’engagement public du gouvernement français en faveur d’un soutien plein et entier quant à la proposition, en l’état, de règlement de la Commission européenne.
A propos de Réseau Environnement Santé :
Réseau Environnement Santé (RES) est un réseau de 28 associations nationales et locales regroupant près de 10 000 personnes créé en 2009. RES agit pour mettre la santé environnementale au cœur des politiques publiques. En 2010, RES a lancé une campagne contre le Bisphénol A dans les biberons qui a abouti à son interdiction en France et dans l’Union européenne. En 2015, il a obtenu l’interdiction du Bisphénol A dans tous les contenants alimentaires. Il est également à l’origine de l’adoption de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens. En 2017, RES a lancé une campagne Villes et Territoire sans PE.
Contact presse : André Cicolella 06 35 57 16 82